Myriam* (son prénom a été modifié), a été poussée vers la sortie du centre de formation de l'OL en juin 2018, après une année de galère et une semaine seulement après avoir signalé le comportement inapproprié de son entraîneur avec elle et une de ses collègues des U16 (équipe des moins de 16 ans).
Confronté aux accusations, l’entraîneur en question, qui n’a pas donné suite à nos sollicitations, a préféré démissionner. Le club a alors alerté le procureur de la République de Lyon, par courrier, le 21 juin 2018. « Il y a deux victimes citées dans le signalement », précise une source judiciaire. Une enquête a été ouverte en septembre 2018 du chef de propositions sexuelles à mineures de 15 ans, sur une période allant de septembre 2017 à mai 2018.
En effet, l’entraîneur envoie à la jeune fille qui évolue sous ses ordres des messages sans rapport avec le football : « Je me sens bien quand tu es là »… Selon l’avocat, l’entraîneur procédait de la même manière avec d’autres joueuses.
L’avocat explique que lors du tournoi international de Colmar, du 18 au 20 mai 2018, l’éducateur se débrouille pour que sa chambre se situe à côté de celle de Myriam et de sa meilleure amie. L’entraîneur demande aux deux joueuses de le rejoindre dans sa chambre pour parler du match du lendemain. Elles y restent jusqu’à 1 h 30 du matin.
Selon le récit de Myriam, le soir suivant, Yohan D. se rend cette fois dans la chambre des jeunes filles, « se glisse sous la couette, y fait circuler sa main ». Le lendemain, Myriam prévient une joueuse professionnelle et sa famille.
Au retour du tournoi de Colmar, les dirigeants du club, dont l’ancienne internationale Sonia Bompastor, directrice de la section féminine au sein de l’académie, convoquent les joueuses pour leur annoncer le départ de l’entraîneur en qualifiant son attitude de contraire aux valeurs du club et à la loi. Le club assure que jusque-là, il n’avait jamais rien entendu de suspect concernant cet entraîneur.
Mais quelques jours plus tard, le 5 juin, Sonia Bompastor leur écrit : « Je me suis entretenue ce matin avec ma direction concernant [Myriam] et la prise en charge financière. Je vous confirme que […] les réservations et les prises en charge financières des transports, de l’hébergement et des repas seront entièrement à votre charge et ce jusqu’au 30 juin 2019. »
Le club sait très bien que cet arrêt brutal de prise en charge, alors que 100 % des dépenses de Myriam étaient auparavant couvertes, conduira au départ de la joueuse : le niveau de vie de la famille ne permet pas de payer ces frais. D’ailleurs, interrogé par Mediapart, le club ne conteste pas avoir mis la joueuse dehors. Mais il explique que cela ne tient qu’à des « considérations sportives » : la joueuse n’aurait pas assez progressé.
Les parents réalisent alors qu’aucun contrat, aucune convention ne les lie au club ni ne donne d’obligations à celui-ci. « S’agissant du cadre contractuel, les joueurs disposent d’un environnement juridique (loi, convention collective, règlementation) permettant la signature de conventions de formation et de contrats de formation, fait valoir le club. Cet environnement spécifique n’existe pas à ce jour pour les joueuses. »
D’où la démarche de l’avocat Slim Ben Achour qui, en lançant cette procédure, espère qu’un jour prochain, plus aucune jeune fille de 15 ans disant avoir été harcelée ne puisse être laissée sur le carreau.
https://www.mediapart.fr/journal/france/050719/l-ol-une-affaire-d-abus-sexuels-sur-mineures-revele-la-jungle-du-foot-feminin?utm_source=20190705&utm_medium=email&utm_campaign=QUOTIDIENNE&utm_content=&utm_term=&xtor=EREC-83-[QUOTIDIENNE]-20190705&M_BT=135393249294